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vendredi 25 mai 2018

Minéralogie, différence entre roche et minéral

Est-ce un minéral ou une roche?

La question d'un internaute sur la différence entre un minéral et une roche me donne l'occasion de parler de deux magnifiques pierres (souvent polies) que l'on trouve un peu partout dans les boutiques de "minéraux et fossiles" et qui illustrent bien le propos.
Un minéral est un solide à structure atomique périodique et à composition chimique déterminée par une formule (dont l'anion donne la classe d'appartenance; il y en a 9 selon la classification de Strunz) alors qu'une roche est un assemblage de minéraux (comme le granite avec feldspaths, quartz et micas). Il y a bien entendu des exceptions pour confirmer cette règle (comme le mercure qui cristallise à -39°, ou les minéraux amorphes comme l'opale).
L'exemple porte sur le Lapis lazuli et la turquoise, deux pierres bleues très appréciées.
Le Lapis lazuli n'est pas un minéral mais une roche métamorphique (groupe de la Sodalite, feldspathoïdes) qui contient de la lazurite qui donne la couleur,d'autres silicates comme des micas, des carbonates (calcite) et des sulfures (pyrite).
Son usage remonte à 7000 ans et possède des vertus dites: apotropaïques (elle est utilisée comme talisman). Chez les égyptiens, elle protégeait du mauvais sort. Au Moyen-âge, elle est bue en poudre dans du lait pour favoriser la robustesse des membres. La couleur bleu outre-mer est liée à la lazurite qui peut faire 40% de la roche et qui est un silicate complexe hydraté calcosodique pouvant appartenir à différents systèmes cristallins. Elle était exploitée surtout à la mine de Sar-e-Sang, au nord de l'Afghanistan. Sa couleur d'un bleu profond, ponctué de paillettes dorées (la pyrite disséminée) la faisait comparer à une représentation de la voûte céleste. Le bleu utilisé par Johannes Vermeer dans "La jeune fille à la perle" est à base de Lapis lazuli.
La turquoise est une espèce minérale: c'est un phosphate hydraté de Cu et Al: CuAl 6(PO4)4(OH)8.4H2O, du système triclinique, bleu-vert à bleu pâle. Indice de réfraction de 1,610 à 1,65 suivant l'axe d'observation, avec une densité comprise entre 2,6 et 2,9, biaxe+.
Turquoise: image pixabay
Les gisements de ce minéral sont autour de la Mer Rouge, Iran, Turquie,mais aussi Mexique, USA... La mine de Montebras à Soumans, près de Boussac dans la Creuse est le seul gisement d'Europe. La confusion est possible avec la Variscite (que l'on trouve à Pannecé en Loire Atlantique) qui a été utilisée par les hommes du Néolithique pour faire des parures de type collier (comme celui découvert dans le Tumulus de Tumiac (Morbihan).

Sources: "Les minéraux" éd Solar: E.Asselborn, PJ.Chiappero, J.Galvier 1987

jeudi 24 mai 2018

Poème

Le verbe et la Muse
Mai 2018 à Rosquelfen: le temps des rhododendrons

Le temps des fleurs est revenu
Le temps des couleurs de la vie
Exaltation, t'en souviens-tu
Entre Daoulas et le Liscuis?

Tu as souri devant ma prose
Qui t'a parfois même indignée
Les mots restent bien peu de choses
Si par nos actes, invalidés!

Tu es la présence étonnante
De braises vives, couleur de feu
Tu choisis la lumière ardente
Moi, l'ombre douce des chemins creux

Tu es gardienne attentionnée
D'un étrange jardin des regrets
Où les secrets sont bien gardés
Au coeur d'un continent abstrait
Mai 2018 à Rosquelfen: le temps des rhododendrons

Comment comprendre ton langage
Verbe enjolivé des passions?
Comment ouvrir un jour nos cages
Harmoniser nos vibrations?

Dans le pays des grands rochers
Il n'est d'immobile que le temps
Allons voir ma Muse, s'effacer
L'astre solaire vers le Ponant!

J'écoute encore tes longs silences
Au temps présent qui déconstruit.
Ils me révèlent la renaissance
Et les couleurs d'une autre vie

Je sais encore dans une ardoise
Les mots gravés aux jours enfuis,
Ces discrets témoins qui nous toisent
Sur le passage vers l'infini...

samedi 19 mai 2018

Menhir de Porz Guillo en Saint Mayeux, Côtes d'Armor

Complément à l'article du 29 avril 2015 sur le menhir de Porz Guillo en Saint Mayeux (22)



Ce menhir de 4m50 (partie externe) est classé MH depuis le 29 septembre 1952. Il se situe sur la crête topographique qui fait la limite entre Caurel et Saint Mayeux, un endroit magnifique et malheureusement défiguré par une piste de motocross passant à 30m du monument! Comme indiqué dans l'article précédent, ce menhir est extrait des affleurements  proches qui sont constitués de schistes grossiers à grès-quartzite interstratifié, assez typique de cet ensemble Siluro-Dévonien qui constitue la crête topographique à cet endroit. Ce n'est donc pas une roche adaptée à la production d'ardoises car la "fissilité" est fortement perturbée par des microplis, quartzites interstratifiés en lits irréguliers et filonnets de quartz laiteux.

Si ce monument est toujours debout, c'est probablement parcequ'autrefois, il a été christianisé comme on peut le voir en regardant le sommet de sa face sud. On y observe en effet une croix avec une niche creusée dans la roche sous l'une des branches de la croix et sans doute destinée à recevoir une statue (qui elle, a disparu depuis longtemps).

Le 19 août prochain, l'association "Les chemins de l'archéologie" organise dans cet endroit, mais à une distance assez importante du mégalithe en place, une animation autour du Néolithique avec notamment transport d'un menhir et levage de ce menhir, une pierre schsiteuse de ce secteur qui devrait s'élever à trois mètres au dessus du sol et en utilisant les moyens de l'époque!(participation de spécialistes de l'archéologie expérimentale).

mercredi 16 mai 2018

Minéralogie à Bon Repos: Bon Repos sur Blavet (22)

Conférence-causerie sur les minéraux bretons le 2 juin à Bon Repos

Staurotide ou "Croisette de Bretagne" Photo L.-D.Bayle 
Le 2 juin prochain à 15h, j'évoquerai  dans la galerie "Les minéraux de l'abbaye" dans les bâtiments proches de l'abbaye de Bon Repos, les minéraux de Bretagne; un aperçu non exhaustif du sujet mais qui permettra aux amateurs de minéraux de se faire une idée plus précise de la richesse minéralogique de notre région. Dans les minéraux emblématiques de Bretagne, il y a cette fameuse "Croisette de Bretagne" ou staurotide en français, Staurolite en langage international (voir articles antérieurs sur ce blog dans la rubrique "minéralogie"). Ce minéral est parfois confondu avec l'andalousite (comme dans "infobretagne" sur Cléguérec). Il appartient au système cristallin monoclinique et, rajoute le Fleisher(l'ouvrage de référence des minéralogistes), pseudo-orthorhombique, ce qui fait placer cette espèce dans l'un ou l'autre de ces systèmes cristallins, suivant les auteurs.

Andalousite, variété chiastolite des Salles de Rohan (photo PJ)
Mais à Bon Repos (Bon Repos sur Blavet: 22570), le minéral de référence est la chiastolite, une variété d'andalousite à inclusions charbonneuses qui font parfois des figures en croix comme on en voit une sur cette photo. Ces macles (du latin macula: tache) auraient donné les armes de la famille de Rohan comme l'attestent certains auteurs et héraldistes qui s'appuient sur les documents d'archive de la juridiction royale de Ploermel dont dépendait la Vicomté de Rohan au Moyen-âge, ou comme le confirme également Josselin de Rohan dans un entretien avec F. de Monicault et J. Bruno dans le n° 9706 du Hors série "Historia".Ces chiastolites sont particulièrement visibles sur la façade de l'abbaye de Bon Repos.
Sources: pour la staurotide:"Minéraux de Bretagne" de Louis Chauris, Editions du Piat 2014

mardi 8 mai 2018

Frelon asiatique en Centre Bretagne

Frelon asiatique, l'invasion!
Un article du 22 août 2015 sur ce même blog faisait déjà état du développement en centre Bretagne du frelon asiatique, décimant des ruchers au désespoir des apiculteurs. Depuis 2015, on assiste sur Gouarec comme sur Rosquelfen (Bon-Repos sur Blavet en Côtes d'Armor)à un développement régulier de ce frelon et à une diminution importante du nombre d'abeilles (pas seulement par les ruches désertées mais aussi par la rareté de l'abeille sur les fleurs, la disparition des colonies "sauvages" (dans les cheminées notamment).



En ce début de mois de mai, les reines sont encore en train de démarrer de nouvelles colonies. Dans ce bocal de confiture, un nid tout récent de la grosseur d'une balle de tennis, récupéré avec sa propriétaire la reine , seule résidente et toute surprise d'être mise en conserve! Ce nid est le deuxième détruit à 30m de distance du premier qui faisait la même taille!


Cette femelle fondatrice est  plus grande que le mâle de la même espèce et se capture facilement au moment du démarrage d'une nouvelle colonie. Lorsque le nid est repéré alors qu'il ne fait que quelques centimètres, elle est seule dedans  et donc particulièrement vulnérable. Il est  encore temps de piéger ces reines avant la prolifération estivale, mais le nombre de ces frelons, visibles quotidiennement autour des maisons, ne cesse d'inquiéter. Cette espèce a même supplanté le frelon européen devenu plus rare.

NB: clic gauche sur les photos pour les agrandir.

dimanche 6 mai 2018

Entre Histoire et Légende sur les bords du lac de Guerlédan (22)

La tragique histoire de la demoiselle de l'abbaye, passée dans la mémoire collective sur les rives du Blavet (Saint Gelven, Caurel en Côtes d'Armor, Saint Aignan en Morbihan).
Ruines de l'abbaye de Bon Repos, années 1988-90.Photo wikimedia
1636: année des temps agités pour l'abbaye de Bon Repos (sur la trève de St Gelven dépendant de la paroisse de Laniscat, évèché de Cornouaille), impliquée dans le drame qui se déroule à plusieurs kilomètres, le long du Blavet, au lieu-dit Trégnanton (alors treguénanton ou troguénanton).
Les "temps sombres"vont ponctuer l'histoire de l'abbaye, comme des "revers" opposés aux "avers" lumineux des origines et des actions positives de l'Ordre Cistercien. Loin de moi l'idée de faire l'apologie des "temps sombres", mais pour comprendre la persistance d'une telle histoire dans la mémoire des gens du pays, il me paraît nécessaire d'en parler un peu.
Ainsi, dès 1387, l'Ordre de Citeaux dont elle dépend, ordonne des sanctions contre l'abbaye. En 1415, elle entre en conflit avec les fondateurs, la famille de Rohan; les causes sont multiples: luxe des abbés, présence de femmes dans le monastère, fréquentation des auberges par les moines... En 1470, l'affaire de Penguily, un prieur de 1465 accusé de "maléfices, délits et mauvaise administration" (N. Andrejewsky, M.Simon) va déboucher sur la mise sous tutelle de l'abbaye sous l'autorité de celle de Boquen. Au début du XVIe siècle, le Concordat accroît les difficultés; les abbés sont désormais désignés par le roi dans la noblesse et non plus par l'Ordre Cistercien. Depuis les guerres de la Ligue et Henri de Rohan qui est protestant, l'abbatiale de Bon Repos n'est plus nécropole des Rohan. En 1583, Troïlus de Mesgouez, Marquis de la Roche, vice-roi de Terre Neuve, et aventurier sans scrupules pille l'abbaye jusqu'en 1606. L'abbaye, dépourvue des 2/3 de ses revenus se remet à peine de ces temps difficiles lorsque se déroule l'histoire de la "demoiselle de l'abbaye".
Le roi de France, Louis XIII (1601-1643) est lancé depuis 1635 dans la guerre de 30 ans. De nombreuses jacqueries sanglantes affectent les campagnes dans tout le royaume. L'abbé commandataire de l'abbaye est Claude II de Guillier qui meurt en 1646, remplacé par Michel Mazarin, le frêre du célèbre cardinal. Il ne réside pas sur place et ponctionne les revenus par l'entremise d'un régisseur. La situation est tendue car les Dîmes ne tombent pas, les vassaux des Rohan préfèrent s'en affranchir en devenant protestants! En 1636, le prieur est Jean Guegan (article sur ce blog, sur patrimoine de St Gelven, le calvaire de Trégnanton). Un jour de cette sombre année, une jeune fille, sans doute retenue contre son gré dans l'abbaye, décide de s'enfuir. Qui est-elle, et pourquoi est-elle retenue dans l'abbaye?? Toutes les hypothèses sont permises car l'histoire ne répond pas à ces questions...
Ruisseau de Kerouillé à Trégnanton en 2015(assec du lac)
Les anciens du pays racontent encore cette histoire qui peut se résumer ainsi: une jeune fille s'enfuit de l'abbaye... Elle suit le Blavet en rive gauche, descendant la vallée vers Mûr de Bretagne. Elle a parcouru plus de 4 kms quand elle entend des aboiements  de chiens lancés à sa poursuite. Elle franchit le petit ruisseau des sources de Kerouillé et Ty-lan-Vojo en arrivant sur Trégnanton, face à la butte de Malvran sur l'autre rive. Les chiens la rattrapent à cet endroit et se jettent sur elle. Que devient alors le corps mutilé de la malheureuse? Les anciens du pays se posent encore bien des questions à propos de cette histoire: qui était cette jeune femme et quel rôle  jouait-elle pour provoquer un lâcher de chiens volontaire, devait-elle garder le silence??
Trégnanton et son calvaire en 1636 (pastel PJ)
Un monument aurait été érigé par le prieur Guégan à l'endroit où s'est déroulé le drame (ce que semblerait conforter les écrits  de l'abbé Guitterel et la pierre gravée du prieur Guégan; article du 2/03/2018). Mais pourquoi un calvaire à l'emplacement de sa mort? Une recherche de rédemption?Une raison liée à l'importance de cette jeune fille qui aurait pu appartenir à une famille noble du pays?
Depuis ce temps, l'endroit est hanté par les âmes errantes de la demoiselle dont on cherche toujours le nom et une trace de sépulture, mais aussi de Lannezval tué pratiquement au même endroit deux siècles plus tard (affaire jugée en 1889, voir article du 10/04/2015 sur ce blog), et encore l'âme du Seigneur du Cours, tué le 21 février 1796 à Baraval... Dans les mois sombres de l'hiver, cette partie sauvage, silencieuse et préservée du lac de Guerlédan conserve son atmosphère étrange.Gardien de secrets perdus dans le dédale de l'histoire, Trégnanton n'est pas entré dans un schéma contemporain de l'exploitation touristique des rives du lac (malgré les tentatives de Léon Launay, maire et conseiller général de St Gelven dans les années 1980), et son calvaire conserve malgré lui la mémoire d'un temps bien plus ancien que lui.
NB: Florentin-Claude, Seigneur du Cours, né à Corlay en 1753, émigré à l'armée de Condé, chef de Division de l'armée catholique et royale de Bretagne, arrêté au village de Baraval en St Aignan et fusillé par une Colonne Mobile le 2 ventôse de l'an IV (21 février 1796) (infobretagne:Corlay). Baraval est le nom de l'écluse 125 située en aval de celle de Trégnanton mais qui n'existait pas au moment des faits.Cliquer sur les images pour les agrandir.